Le jeu vidéo pour contrer la solitude des jeunes en souffrance psychique
Groovy Park ressemble à n’importe quel jeu vidéo. On y créée l’avatar de son choix pour rejoindre un parc aux couleurs apaisantes, dans lequel on nous propose de collaborer à la création de morceaux de musique. Derrière les quêtes qu’il propose, le jeu se présente en réalité comme un dispositif d’amélioration de la qualité des soins en santé mentale. « Groovy Park est un intermédiaire pour rétablir ou changer la relation, avec soi-même, avec le personnel soignant, ses proches ou ses pairs », explique Emilie Bovet, Maître d’enseignement à HESAV et co-requérante du projet.
De précédentes recherches ont ainsi montré combien la musique, intégrée aux soins face aux souffrances psychiques, contribue à contrer le sentiment de solitude des patient·es, à favoriser le bien-être et à réguler les émotions. Le collectif Amenhotep, qui rassemble des chercheur·euses de HESAV, de la HEMU, de la HEIG-VD et du CHUV, mène ce type de travaux depuis plus de 13 ans. « Nous voulions poursuivre la recherche en ajoutant la dimension ludique du jeu vidéo », raconte Angelika Güsewell, directrice de la recherche à l’HEMU et requérante principale du projet.
Briser la solitude, redonner de la confiance
Autre enjeu justifiant le choix du jeu vidéo : adresser les jeunes avec des outils adaptés. « Pour nous en assurer, nous avons ainsi invité les jeunes à participer au processus de conception, aux côtés des game designers », se réjouit Emilie Bovet. Au-delà du résultat, ajusté à leurs besoins et à leurs usages, l’expérience elle-même a eu son lot de bénéfices. La valorisation de leur expertise et de leur loisir a en effet permis d’améliorer leur sentiment de confiance et d’estime d’elle·eux-mêmes. Un changement essentiel pour améliorer les relations et leur implication dans le soin.
« L’estime de soi intervient également au moment de jouer, affirme Emilie Bovet. Groovy Park est fait pour être toujours bienveillant, jamais dissonant ». Que ce soit entre pairs, avec les proches ou les soignant·es, les jeunes ont aussi l’occasion de démontrer de la dextérité et de la créativité. Des compétences valorisantes, notamment parce qu’il change l’équilibre des savoirs entre le personnel et elles·eux.
Un dispositif dans un protocole de soins
Depuis la fin de l’été 2024, les deux partenaires terrain, l’Institut maïeutique et l’UHPA, utilisent Groovy Park avec leurs patient·es dans le cadre d’une phase de test. Il s’agit de déterminer la manière la plus adéquate d’encadrer ou non le jeu : avec ou sans protocole ? dans un atelier ou en usage libre ? avec ou sans prescription ? « Pour le moment, si Groovy Park a trouvé sa place dans les deux institutions, on relève des usages et besoins différents, du fait notamment de la différence des publics », note Emilie Bovet. Le projet, financé par InnoSuisse, poursuit ainsi sa phase de test avant d’envisager sa commercialisation.