Des études d'infirmière en cours d'emploi ? C'est possible !

Assumer une formation HES en cours d'emploi et endosser peu à peu le rôle d'étudiant.e infirmier.ère sont les défis relevés par les étudiant.e.s de la filière Bachelor Soins Infirmiers en cours d'emploi. Découvrez le parcours de Mercedes Eiroa et les enjeux que cela représente.

Mercedes Eiroa, 48 ans, n’a pas le profil type de l’étudiante Bachelor. Comptable dans son Espagne natale, elle a exercé plusieurs métiers à son arrivée en Suisse en gardant une seule ligne de conduite : continuer à se former tout en travaillant.

Qu’est-ce qui vous a attirée dans les soins ?

J’y suis arrivée par hasard en travaillant dans un EMS. Tout me plaît, et en particulier l’accompagnement aux personnes âgées, pour lesquelles j’ai un faible. Mon plaisir a augmenté au fur et à mesure que je me formais. En cours d’emploi, j’ai d’abord obtenu l’attestation d’auxiliaire de santé de la Croix-Rouge puis le CFC d’ASSC. Je pouvais confronter la théorie apprise en cours et la pratique sur le terrain. Le fait de rencontrer des collègues externes à l’institution est un plus. C’est une nouvelle vision.

Qu’est-ce qui vous motivée à devenir infirmière ?

Pour moi, devenir infirmière était une formation continue. Je me suis renseignée et j’ai découvert le programme « en emploi » vaudois proposé à HESAV. En amont, J’ai commencé à travailler en traumatologie au CHUV pour élargir mon expérience et avoir une autre vision des soins. Dès le 3e mois, j’ai dit à ma cheffe que j’avais envie de progresser et elle m’a vraiment soutenue. J’ai débuté à HESAV en 2016. Ce qui est très précieux, c’est d’entamer la formation par le semestre de préparation (SEPRE). Cette étape permet de tester si on peut passer de la pratique à la théorie, si on arrive à s’organiser, à emmagasiner les connaissances, à gérer le stress.

Quelles qualités faut-il pour réussir une formation en cours d’emploi ?

Nous sommes des adultes, avec des charges familiales pour certaines. Il faut de la persévérance, de la motivation et du courage, parce qu’il y a des moments où on se remet en question. Savoir s’organiser est aussi crucial.

Comment cela se passe-t-il sur le terrain ?

Heureusement, mes collègues sont jeunes et savent ce que c’est que d’être étudiante. Je suis engagée comme ASSC et j’en assume le cahier des charges. Pour apprendre davantage, j’ai trouvé des astuces : je mets des affichettes qui disent : « j’ai appris à poser un cathéter, faire un pansement, enlever des agrafes, appelez-moi ! ». Les infirmières m’appellent pour pratiquer à leurs côtés. Mais c’est à bien plaire et c’est une question de temps, parce que je dois faire mon travail aussi. Il arrive que je doive jongler pour ne pas être en surcharge mais je tiens à faire les deux.

Quel.le.s défis/difficultés avez-vous dû relever ?

La difficulté principale, c’est de gérer le stress. C’est très impressionnant d’être toujours sous surveillance pendant les enseignements cliniques.

Le premier défi, c’est que, dans le service, on voudrait tout appliquer comme à l’école, alors que sur le terrain les choses vont beaucoup plus vite. Par contre, à la différence des étudiants à plein temps, nous savons de quoi il retourne quand on nous explique des gestes à l’école.

Un autre défi est que mes collègues ne me voient plus comme une ASSC, mais comme une étudiante. C’est d’autant plus compliqué que je suis plus âgée et que c’est une nouvelle voie de formation à laquelle les soignants ne sont pas habitués. Mais il m’arrive même qu’elles me demandent quelle est la dernière norme ou procédure enseignée à l’école !

Quelles mesures votre employeur a-t-il dû mettre en place ?

J’ai de la chance : ma cheffe est à l’écoute et toujours disponible pour m’aider. Elle m’a laissée prendre les initiatives qui m’ont permis de me présenter comme étudiante infirmière (présentation à l’équipe, affichettes). De plus, l’année passée, elle a mis en place une nouvelle organisation qui valorise le travail des ASSC car nous avons davantage d’autonomie et d’indépendance. Nous devenons responsables d’un groupe de patients stables, en collaboration avec une infirmière référente. Cela me favorise en tant qu’étudiante infirmière, car je peux mettre en pratique plus facilement et rapidement la théorie apprise à l’école. Du coup, j’ai donné envie à deux autres collègues de faire la formation !

Avez-vous des contacts avec les autres étudiant.e.s en Soins infirmiers ?

Oui, il y a des cours en commun et je les croise aussi à l’hôpital. Entre la différence d’âge et d’expérience, nous voyons les choses autrement, ce qui nous permet d’être complémentaires. Ils nous aident avec l’informatique et, en retour, nous posent beaucoup de question sur la pratique. A l’école, la différence d’âge ne pose aucun problème puisque nous sommes tous là pour étudier, travailler et faire nos preuves. Nous partageons aussi les semaines interprofessionnelles qui sont très riches, parce que nous travaillerons aussi ensemble après la formation.

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui se lance dans cette voie ?

C’est la question que mes collègues me posent. Je leur dis qu’il faut vraiment qu’ils se préparent et qu’ils s’organisent, parce que c’est une formation à haut niveau, exigeante, et qui dure 4 ans.

Quels projets d’avenir faites-vous ?

Je n’aurais jamais pensé devenir infirmière quand j’ai étudié la comptabilité en Espagne (rires). Aujourd’hui, je suis très fière, je me sens étudiante et jeune ! c’est une vraie satisfaction ! Mon projet à ce stade, c’est de finir ces études.

La possibilité de se former en cours d’emploi a-t-elle été déterminante ?

Je trouve que c’est un projet magnifique. Cette formation offre une chance à des personnes déjà dans les soins, plus âgées et qui ont besoin d’un salaire. Se former comme infirmière est très valorisant pour nous et nous serions bloquées sans cette opportunité.